Chaque terre porte ses héros. Dans le Lot, nous n’en manquons pas, ses hommes célèbres qui ont fait l’histoire, construit notre culture, de Joachim-Napoléon Murat à Jacques-Joseph Champollion, à Léon Gambetta, de Françoise Sagan à André Breton ou Nino Ferrer, et bien d’autres. Je suis personnellement attaché à la figure de Gaston Monnerville dont le souvenir reste encore vif dans la mémoire de tous les lotois et dont nous célébrerons l’an prochain le trentième anniversaire de sa disparition le 7 novembre 1991.
Venu des Outre-mer, en 1912, pour entrer en seconde au lycée Pierre de Fermat, à Toulouse. Il y fait son droit et c’est ici qu’il prête serment, avant de partir à Paris, pour y faire carrière. A la suite de la célèbre affaire des « Insurgés de Cayenne », Gaston Monnerville prononce un illustre et vibrant discours qui est un véritable réquisitoire contre le colonialisme et le traitement infligé à la Guyane.
Il obtient l’acquittement pour tous, en mettant notamment en lumière les injustices et les dénis des droits citoyens dans les Dom-Tom, il s’engage en politique, d’abord en Guyane, dont il devient député puis sénateur, ainsi que maire de Cayenne.
Mais c’est dans notre département, dans le Lot, qu’il prend son envol et effectue l’essentiel de sa vie politique. Sénateur, président du conseil général, représentant le canton de Sousceyrac, maire de Saint-Céré, il dédie sa vie à notre département. Alors même qu’il est Président du Conseil de la République, puis du Sénat, il est toujours présent sur le terrain, au plus près des habitants, toujours attentif leurs demandes, prêt à les aider, à résoudre une difficulté, à trouver une solution à un problème.
Il était attaché à notre terre et avait compris avant les autres l’importance de conserver des racines profondes dans les territoires de notre pays. Cet attachement au terroir nous inspire particulièrement aujourd’hui, au moment où nous devons résorber les fractures territoriales qui se sont creusées au cours des dernières décennies. Il nous oblige tous, nous, élus de la République, a en faire une priorité fondamentale de notre action.
La voix de Gaston Monnerville resonne aussi en ces temps troublés, où la liberté est menacée par la montée du terrorisme, du fanatisme, de l’obscurantisme. Écoutons-le donc, au procès des assises de Nantes, conclure magistralement sa plaidoirie par ces mots : « Messieurs les jurés, la France nous a enseigné qu’il faut mettre avant tout, au-dessus de tout, le respect de la personne humaine et la sauvegarde de nos libertés. »
Suivons son exemple, celui d’un résistant à la barbarie nazi, celui d’un élu de la République qui combattit toute sa vie l’antisémitisme, le racisme et toutes les formes de discrimination, rappelons- nous seulement son discours de 1933 sur l’esplanade du Trocadéro. Suivons son exemple celui d’un citoyen, qui était fier de ses origines, tout en étant profondément, universaliste.
29 ans après sa mort, inclinons-nous avec respect devant la mémoire de Gaston Monnerville, combattant de la justice et de la liberté, représentant la France à la création de l’O.N.U à Londres, défenseur inlassable de l’universalité des droits de l’homme, exemple et défenseur de l’ascenseur social par l’éducation, défenseur de la raison contre le fanatisme, et homme de cœur immensément, profondément attaché à notre territoire, le Lot.
Huguette Tiegna